Actualités de l'association
Argumentaire d'elisa-asile
La motion 24.3511 « Pas de regroupement familial pour les personnes admises à titre provisoire » vise à supprimer complètement ce droit, comme le suggère son titre. Cette motion n'est pas un instrument de politique migratoire, car très peu de personnes arrivent ainsi en Suisse. Cependant, elle entre en conflit avec la Constitution fédérale, le droit international ainsi que la tradition humanitaire de la Suisse.
Admission “Provisoire” - Terme Trompeur : Le statut de l’admission provisoire en Suisse est un concept juridique complexe et peu compréhensible pour le grand public. Dans les faits, il s’agit d’une protection internationale reconnue en raison des risques encourus par les personnes en cas de retour dans leur pays. La Suisse violerait ses obligations internationales en exécutant un renvoi. L’idée même d'une "admission provisoire" est trompeuse, car elle suggère un séjour temporaire alors que, dans les faits, ces personnes restent à long terme en Suisse.
Contrairement à d'autres pays européens qui leur octroie une « protection subsidiaire », la Suisse (et le Liechtenstein) n’accorde pas de véritable statut de protection aux personnes fuyant les guerres et les violences généralisées. Les personnes admises provisoirement ont des besoins de protection comparables à ceux des réfugié-es reconnu-es, notamment celles venant d'Afghanistan, de Syrie ou d’Érythrée. Toutefois, elles sont systématiquement désavantagées en matière de droits, y compris pour le regroupement familial.
Les conditions actuelles déjà très strictes du regroupement familial : Environ 43'000 personnes sont admises à titre provisoire en Suisse. Elles doivent surmonter des obstacles élevés pour bénéficier du regroupement familial : 2 ans de délai avant de soumettre une demande, indépendance financière, bonne intégration. Entre 2020 et 2023, seuls 108 autorisations de regroupement familial ont été accordées chaque année à cette population. Cette mesure symbolique n’aurait donc qu’un impact négligeable sur la migration globale. Sa suppression placerait la Suisse en conflit avec le droit international et aurait un impact négatif à long terme sur l’intégration des personnes titulaires de ce statut, et donc sur la cohésion sociale.
Le regroupement familial : un outil d'intégration essentiel : Le regroupement familial est un facteur clé pour l’intégration des personnes admises provisoirement. Une étude de la Croix-Rouge a montré que la séparation entraîne une détresse émotionnelle qui peut compromettre gravement l'effort d'intégration : apprentissage d’une langue, relations sociales, professionnelles sont péjorées par l’angoisse de savoir son épouse, mari ou enfant en danger. En revanche, la réunification familiale favorise la stabilité psychologique et sociale, rendant l'intégration plus rapide et durable. La suppression de ce droit compliquerait une intégration rendue déjà difficile par les conditions liées au permis F.
Les obligations internationales de la Suisse : L'interdiction du regroupement familial pour les personnes admises provisoirement contrevient aux engagements internationaux de la Suisse. Le droit à la vie familiale est un droit fondamental inscrit dans plusieurs conventions ratifiées par la Suisse, telles que le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (art. 23), la Convention relative aux droits de l'enfant (art. 10) et la Convention européenne des droits de l’homme (art. 8).
Un devoir humanitaire, moral et constitutionnel: La Suisse s'enorgueillit d'une longue tradition humanitaire. Depuis des siècles, elle a accueilli des personnes persécutées, des Huguenots aux réfugié-es des conflits modernes. Renier le droit au regroupement familial constituerait une régression majeure. Enfin, cela reviendrait à violer la Constitution suisse, qui protège le droit à la vie familiale. Assurer ce droit implique de créer les conditions matérielles pour le rendre effectif, y compris en facilitant le regroupement familial. Remettre en cause ce droit met en péril les valeurs fondamentales de la Suisse.
Association elisa-asile, octobre 2024